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Les transformations
du travail au Japon

(2018-2019)

Quand il ne s’agit pas de sa culture ou de son histoire, c’est souvent par l’intermédiaire du thème du travail et du monde de l’entreprise que le Japon attire l’attention. Autrefois, c’était la réussite économique de ses grands groupes qui générait un engouement pour les recherches sur le « modèle japonais ». Aujourd’hui, ce sont davantage les transformations du travail et les défis qui l’accompagnent qui suscitent un intérêt fort.

Si cette question est importante, c’est notamment parce que les enjeux qu’affronte depuis deux décennies le Japon constituent un aperçu de ceux auxquels la France doit maintenant faire face : la question de l’emploi des seniors dans un contexte de vieillissement de la population, les inégalités engendrées par la diversification des formes d’emploi alors que se développent les plateformes numériques de type Uber, ou encore, les difficultés posées par la gestion du temps de travail des salarié.es à l’heure de la généralisation du télétravail en raison de la pandémie mondiale.

Le bien-être au travail

Malgré les différences qui existent entre ces deux pays, les analyses comparatives France/Japon, s’avèrent à la fois riches et nécessaires. Parmi les thématiques où chacun peut apprendre de l’autre, la question du bien-être au travail et de ses évolutions a fait l’objet d’un projet de recherche lancé par la Fondation France-Japon entre 2018 et 2019. Le constat de départ était le suivant : dans ces deux sociétés, les transformations du monde du travail depuis les années 1990 s’accompagnent d’un déclin du bien-être dans les entreprises dont l’impact sur la productivité se fait aussi sentir. L’objectif était de comprendre les origines de ce phénomène et de porter un regard sur les solutions proposées par le Japon.

Ce projet a d’abord débouché sur la publication d’un rapport de recherche en novembre 2018. Une équipe dirigée par Sébastien Lechevalier et composée de jeunes chercheurs de l’EHESS en économie et en sociologie a procédé à une analyse des travaux de recherche menés au Japon sur cette question. La première partie du rapport est consacrée aux grandes transformations qui ont marqué le monde du travail japonais depuis les années 1990 (baisse du salaire moyen, augmentation de l’emploi non régulier, précarisation de la situation des jeunes, des femmes et des seniors) et à la manière dont elles pèsent sur le bien-être au travail. La deuxième partie détaille les réponses apportées par le gouvernement et les entreprises à travers la régulation du temps de travail, les diverses initiatives prises afin d’améliorer l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, et la promotion des femmes, le point d’aboutissement étant l’adoption de la Réforme du style de travail (hatarakikata kaikaku) en 2018. À la suite de ce rapport, la FFJ a co-organisé avec le JILPT un workshop le 15 mars 2019 à Tokyo.

L’impact des nouvelles technologies sur la productivité et l’emploi

L’intelligence artificielle (IA), générant à la fois une attente de hausse de la productivité et une inquiétude concernant la destruction massive d’emplois, remet au goût du jour l’analyse des liens entre innovation technologique et emploi. Certains prédisent en effet que son impact sur l’emploi pourrait surpasser tout ce qui a été analysé jusqu’à présent. Hors, si l’on définit l’IA comme « l'ensemble des théories et des techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l'intelligence », on voit la continuité avec la robotique. On peut alors tirer quelques leçons des cas précédents d’introduction de nouvelles technologies ayant conduit à des formes d’automatisation pour nuancer le catastrophisme des projections de destruction massive d’emploi. Il y a cependant quelque chose de nouveau : la nature même du travail pourrait s’en trouver bouleversée avec, par exemple, l’émergence de nouveaux métiers, associés à des statuts d’emploi précaires, indispensables à la construction de l’IA. Par exemple, toutes les activités visant à faire apprendre aux machines (identification des visages par exemple) et qui requiert la mobilisation de travailleurs sur des tâches parcellaires.

Dans ce contexte, il est intéressant d’étudier le cas japonais car l’introduction de nouvelles technologies est présentée au Japon comme une solution au manque de main d’œuvre alors que dans un même temps elle détruirait massivement les emplois des secteurs actuellement en suremplois. De plus, le changement organisationnel lié aux nouvelles technologies n’a pas été à la hauteur des efforts consentis en matière de recherche et développement, l’impact de l’innovation sur la productivité est limité et les gains de productivité résultent plus de l’organisation du travail que de l’automatisation.

Au carrefour de l’économie du travail, de l’économie industrielle et de l’économie de l’innovation, ces questions sont développées dans un projet de recherche qui s’inscrit dans le cadre d’une collaboration avec l’Université Keio et son Panel Data Research Center dirigé par le Professeur Isamu Yamamoto. Le premier moment fort de ce projet a été la tenue d’une journée d’étude organisée à Paris le 20 novembre 2019. Au cours de cet événement, des chercheuses et chercheurs français et japonais appartenant à diverses institutions se sont rencontrés afin de réfléchir ensemble à la manière dont l’innovation technologique peut contribuer à améliorer le bien-être au travail.

Equipe

Publication

Événements

20/11/2019
FFJ/Keio University Workshop "Technological Progress and Inequalities of Time allocation and Well-being"
>>Programme<<

15/03/2019
Workshop international "Work Style Reform, Productivity Improvement, and Well-being at Work from the viewpoint of industrial relations in France and Japan"
>>Programme<<