Publications Newsletter Lettre 2013-1
La lettre de la Fondation France-Japon de l'EHESS
 
No 2013-01
Mai 2013

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1- Editorial 


2- Actualité des programmes de recherche

La désindustrialisation et le futur de l’industrie (compte rendu du symposium et du workshop co-organisé avec le GRIPS les 8 et 9 avril 2013 à Tokyo)


3- Évenements à venir 

"Towards better and deeper relations between Europe and Japan", Conférence co-organisée avec l’EJARN à Paris les 24 et 25 juin 2013


4- Entretien

« Etudier la désindustrialisation au Japon pour en tirer des leçons dans le cas de la France ».
Florimond Bourdeaux au sujet de son stage à l’Ambassade de France à Tokyo
 
Pourquoi avez-vous choisi de faire ce stage au Japon ?
J’ai eu la chance, il y a sept ans, de partir une première fois au Japon sur les traces de mon père qui s’y était établi à la fin des années 1970. Cette première expérience, de courte durée, a indéniablement créé chez moi le besoin d’y retourner pour passer plus de temps dans cette société si différente de la nôtre, occasion qui m’a été donnée l’an dernier grâce à ce stage proposé par Sébastien Lechevalier, président de la FFJ. Le stage, en collaboration avec l’Ambassade de France à Tokyo, s’est passé au sein du service économique régional de l’ambassade, sous la tutelle de Brieuc Monfort, alors conseiller financier. 

En quoi votre stage consistait-il?

L’objectif du stage était d’étudier la désindustrialisation au Japon pour en tirer des leçons dans le cas de la France. Je devais plus précisément chercher à estimer l’impact des délocalisations industrielles depuis le Japon sur l’emploi domestique japonais, ce qui, dans le contexte actuel français, m’apparaissait comme une perspective très pertinente pour renouveler ma compréhension de ce processus très médiatisé mais encore peu étudié. Mon stage à l’Ambassade comprenait deux volets : je devais d’une part mener mes recherches sur les délocalisations d’entreprises japonaises tout en alimentant d’autre part le travail de veille macroéconomique qui constitue l’activité principale du service économique régional. J’ai ensuite constitué une base de données suffisamment riche pour travailler sur les délocalisations industrielles japonaises, et réaliser de premières estimations sur la base des méthodes économétriques que j’avais retenues au cours de mes recherches

Quelles leçons tirez-vous de votre étude ?

Je tire de mon étude un bilan relativement positif des transformations industrielles du Japon au regard de ce qui s'est passé dans le même temps en France : les deux pays ont certes vu la masse des travailleurs industriels considérablement diminuer depuis les années 1970 mais ce déclin du secteur manufacturier a été beaucoup plus important en France - la part des travailleurs industriels au sein de la population active française a diminué de 40% depuis 1970 contre "seulement" 25% au Japon. En outre, le Japon a su opérer une reconversion vers les secteurs industriels porteurs issus des nouvelles technologies de l'information et de la communication. 
Dans ce contexte, les délocalisations jouent un rôle crucial et complexe dans les transformations de nos appareils industriels: s'il est clair aujourd'hui que les délocalisations provoquent des destructions d'emplois domestiques, cet effet est potentiellement contrebalancé par l'impact positif de ces nouveaux marchés étrangers sur la demande de produits domestiques. Le cas du Japon m'a permis de comprendre que les délocalisations et plus généralement la désindustrialisation du pays participent davantage d'une réorganisation de la production à une échelle régionale en Asie du Sud-Est que d'une seule recherche d'économies de la part des entreprises japonaises. De tels bouleversements ne peuvent se faire sans une politique industrielle qui permette à la fois de soutenir l'effort des entreprises japonaises à produire mais aussi de protéger les travailleurs les plus menacés par la désindustrialisation et les délocalisations. C'est le pari du gouvernement japonais aujourd'hui qui souhaite que le "kudoka" (désindustrialisation) soit une opportunité de développement plus qu'un symptôme de déclin économique.

Une expérience a-t-elle été plus marquante que d’autres durant votre stage? 
L’environnement dans lequel j’étais plongé à l’ambassade a rendu mon stage exceptionnel, que ce soit les collègues avec qui j’ai travaillé ou les contacts que j’ai obtenus grâce à eux pour mon étude. A cet égard, les différents entretiens que j’ai conduits avec les entreprises japonaises dans les secteurs de l’automobile et de l’électronique ont sans aucun doute constitué une expérience très marquante de mon stage. Ces échanges me permettaient enfin de confronter ma vision de l’économie japonaise avec la réalité vécue par les grands groupes industriels japonais tels que Panasonic ou Honda, chose que je n’aurais jamais pu vivre dans un autre contexte.

Quel bilan tirez-vous de cette expérience ? 

Je retire de ce stage une expérience à la fois très riche sur le plan professionnel et personnel. Travailler au Japon au sein du service économique régional de l’Ambassade de France a été une chance extraordinaire pour réaliser mon étude. Sur le plan personnel, cette expérience m’a donné l’occasion de faire de très belles rencontres et d’en apprendre encore un peu plus sur la culture japonaise qui ne cesse de me fasciner. Pour toutes ces raisons, je tiens à remercier chaleureusement Sébastien Lechevalier et la FFJ pour la confiance qu’ils m’ont accordée en me permettant de partir, leurs conseils et leur soutien moral et financier, ainsi que Brieuc Monfort et l’ensemble du service économique régional pour leur accueil et leur aide au cours de mes recherches. 
 
 
Comité éditorial: 
Kae AMO, Sébastien LECHEVALIER, Adrienne SALA